Le groupe Outhere Music s’associe au projet humanitaire et culturel de Music Fund et confère au voyage du Florestan sa dimension sonore. Régulièrement, nous vous proposons la « playlist du bord », résumé subjectif et sonore des émotions, des sensations et des échanges qu’autorisent un grand voyage sur un petit voilier…
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Nonchalamment déposé sur la table à cartes, entre les instructions nautiques et les cartes marines, le journal de bord interpelle quiconque met le pied sur un voilier. Ce livre d’une centaine de pages, toujours ouvert à la date du jour, est la mémoire du voyage. Ses colonnes regorgent d’informations techniques, et c’est d’une main tantôt lasse, tantôt fébrile que l’équipage consigne, entre deux quarts, la progression de Florestan sur les flots, les caprices de la météo ou encore la hauteur des montagnes d’eau qui portent le bateau toujours plus vers l’ouest depuis deux ans. Mais le journal reprend également les événements, anodins ou exceptionnels, qui viennent ponctuer la vie en mer. Le moindre navire croisé au large, bateau de croisière pimpant ou épave en voie de décomposition, gagne une ligne dans le grand cahier bleu, tout comme les diverses curiosités flottantes, les oiseaux de mer, les phénomènes météo hors du commun, les avaries et les accidents. Ainsi, la visite quotidienne d’une colonie de fous de Bassan entre le Vanuatu et l’Australie ou un orage généralisé dans le pot-au-noir, au large des côtes de l’Equateur, sont-ils longuement décrits dans un style alternativement humoristique et exalté, en fonction de l’intensité du moment vécu. Car le livre de bord se veut aussi le journal intime du navigateur, reflet de ses nombreux états d’âme, des joies les plus éclatantes aux ras-le-bol les plus profonds. Feuilleter ces pages noircies dans le secret de l’océan, instantanés précieux de quelques morceaux de vie fondus dans le grand bleu, constitue une plongée dans l’univers fascinant de la navigation. En voici quelques extraits.
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6 décembre 2014, 7h30: « Arrivée à Tarrafal, sur l’île de São Nicolau (Cap Vert), le jour de la Saint-Nicolas… »
8 décembre 2014, 15h30: « Mouillons l’ancre devant Santa Luzia (Cap Vert). Île déserte. »
24 décembre 2014, 23h: « Le vent est tombé tout à fait depuis 18h. Florestan est à la dérive. Passons le réveillon de Noël sur une mer plate, dans le silence absolu, au clair de lune. »
30 décembre 2014, 10h30: « Latitude : 14°41’14 ». Bach n’est pas loin ! »
4 janvier 2015, 17h: « Arrivée au port du Marin (Martinique) après 18 jours de mer. Echouage dans 40 cm d’eau. Florestan tracté par 5 annexes de 5 plaisanciers solidaires. »
23 mai 2015, 21h: « Orage généralisé. Peu de route parcourue, au 120°, à éviter les coups. Nombreux éclairs, 30 noeuds de vent. Plancton phosphorescent et dauphins ‘torpilles’. Trombes d’eau. »
29 mai 2015, 23h45: « Passage de l’Equateur par 84°44’75 » de longitude ouest. Visite impromptue à bord de Neptune (dit « Père La Ligne ») et de sa délicieuse épouse Amphitrite. »
8 juin 2015, 1h30: « Deux virements de bord pour éviter cargo. Pas de réponse à la radio. Préparé fusée parachute. »
24 juin 2015, 8h: « Mettons à la cape. Jérôme plonge pour enlever filet de pêche coincé dans l’hélice. Alexandra surveille requins. »
26 juin 2015, 20h: « À l’ancre dans la baie d’Atuona, sur l’île d’Hiva-Oa (Marquises), après 36 jours de traversée. Quelle paix! »
12 juillet 2016, 18h: « Depuis 3-4 jours, au coucher du soleil, ils arrivent. D’abord, tournent longuement autour du bateau, puis un plus courageux que les autres aborde le bateau par le panneau solaire. Cinq ou six petites séances de patinage et grands coups d’aile infructueux puis, finalement, atterrissage réussi. Le haut des panneaux permet de coincer les pattes, mais ça glisse. S’ensuit donc une succession de glissades de gauche à droite. Tentatives de freinage à coups d’ailes qui se coincent partout. On s’émerveille avant de chasser gentiment le visiteur. Revient deux ou trois fois avant d’avoir compris. Pousse un cri furieux au moment de son dernier envol. Puis va « incognito » se poser sur le balcon avant. Vite surpeuplé… »
7 septembre 2016, 16h: « Croisons bateau de pêche indonésien. Tente de nous approcher. Mettons le moteur pour l’éviter. Course-poursuite d’une heure, avant de le distancer. »
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